my heart is still broken ✩ arizona

AFTERNOON NEGOCIATIONS AT HOME. ✩ Si les évènements passés hantaient toujours les habitants de la ville, ils avaient déjà rejoint les archives cérébrales de Victoria depuis un certain temps. Elle s'en sentait parfois égoïste, mais c'était aussi bien au-dessus de ses forces, elle n'avait plus le temps de s'attarder sur les tragédies des autres. Après tout, les autres ne s'étaient pas non plus attardée sur sa propre tragédie, laquelle l'empêchait elle-même de passer à autre chose. Le maire était décédé, et aussi triste que cela fut, Victoria ne pouvait s'empêcher de penser qu'au moins lui n'aurait pas à endurer une vie de mutilé. On se souviendrait de lui comme d'un politicien engagé dans ses divers projets, négatifs ou non. On se souviendrait de lui comme d'un mari et d'un père aimant, à moins que celui-ci ait eu quelques travers. Mais personne ne le regarderait jamais avec un regard empli de pitié, et de compassion hypocrite. À l'époque, Victoria adorait sentir les yeux du monde sur elle. On la dévorait des yeux, de désir comme de jalousie, mais elle adorait ça. Elle avait donc appris à ne plus jamais se mettre en avant. Au moins autant que son fauteuil roulant et le fait de ne porter qu'une seule chaussure ne lui permettaient. L'espagnole consacrait toute l'énergie qu'il lui restait à passer inaperçu, à être invisible. Elle ne souhaitait ne laisser aux gens qu'elle rencontrait aucun souvenir de sa personne. Et aussi triste que cela la rendait, elle ne voulait plus partager son talent, quel qu'il soit, avec quiconque. Pourtant, une artiste peintre locale qu'elle admirait, et à qui elle avait acheté une toile quelques temps auparavant, avait une toute autre idée en tête. Victoria l'avait rencontrée alors que celle-ci était venue déposer la toile en question. Habituellement, c'était Russell qui se chargeait d'ouvrir la porte et de gérer ce genre de transactions. Mais il était absent ce jour-là, et Victoria lui en était secrètement reconnaissante, car sa rencontre avec Arizona s'était montrée surprenante. Pour la première fois depuis longtemps, la violoncelliste avait pu échanger autour des domaines artistiques qui la faisaient vibrer autrefois. Et c'était peut-être pour ressentir tout cela de nouveau qu'elle avait revue la rouquine plusieurs fois, et qu'elle l'avait invité aujourd'hui à se joindre à elle autour d'une tasse de thé. Elle était donc arrivée au beau milieu d'une séance de kinésithérapie à domicile que prenait régulièrement Victoria. « Oh, bonjour Arizona. » L'espagnole se sentait un peu gênée que Russell ait guidée la jeune femme jusqu'ici, alors qu'elle se trouvait en position de faiblesse. « Je suis désolée, je... C'est bientôt terminé. Je t'en prie, assieds-toi. » Par chance, les divers équipements utilisés au cours de la séance n'empiétait pas sur le canapé, cette fois. « Comment vas-tu, depuis notre dernière rencontre? » Victoria ne savait pas tellement que dire, intimidée que son invité puisse être témoin d'une pareille situation.

Arizona tentait indéniablement de fuir le foyer familial. Sa relation avec Jeremy virait au drame et elle commençait à se lasser de la situation, toutefois elle ne voulait pas en démordre, selon elle, Jeremy devait avouer sa maladie au reste de sa famille. La jolie rousse était heureuse d’avoir rencontré Victoria, une violoniste qu’elle admirait et pour qui elle avait découvert un talent pour la peinture. A présent elle n’avait qu’une idée en tête : convaincre la jeune femme d’exposer ses œuvres dans sa galerie. La galeriste en était sûre, son exposition aurait un énorme succès. Cela tombait bien puisque l’espagnole l’avait invitée à prendre le thé, elle tenterait de la convaincre une nouvelle fois. Cependant, elle savait que la jeune femme émettait quelques réserves à se présenter en public, elle avait remarqué qu’elle fuyait poliment les questions sur la musique. La quarantenaire arriva sur le pas de la porte de la maison, c’est le mari de Victoria qui lui ouvrit et lui indiqua de se diriger vers le salon. Ari ne pu s’empêcher de s’arrêter brusquement lorsqu’elle remarqua que Victoria était en séance de kinésithérapie, elle avait l’impression de briser son intimité et cela la mettait quelque peu mal à l’aise. La jeune femme semblait également gênée. « Oh, bonjour Arizona. » dit-elle visiblement surprise de sa venue. « Je suis désolée, je... C'est bientôt terminé. Je t'en prie, assieds-toi. » lui dit-elle visiblement confuse. « Non c’est moi, je suis désolée, je suis arrivée un peu plus tôt, je ne savais pas que tu avais une séance ! » indiqua-t-elle embarrassée. Difficile pour les gens sans handicap d’imaginer toutes les contraintes d’être en fauteuil roulant. Soudain, Ari ne pu s’empêcher d’imaginer Jeremy à la place de Victoria, elle préféra chasser rapidement cette idée de ses pensées sinon elle allait fondre en larme. La maladie de Jer n’est pas facile à vivre pour la rouquine d’autant plus qu’il se terre dans son mensonge sans en parler à personne. « Comment vas-tu, depuis notre dernière rencontre? » demanda Victoria. « Ça va je te remercie et toi comment ça va ? » demanda-t-elle en retour à son interlocutrice. La galeriste commença à prendre place sur le canapé. Elle attrapa son ordinateur portable. « J’ai quelque chose à te montrer » lança-t-elle en laissant planer le suspens. La quarantenaire n’y allait pas par quatre chemins, elle voulait convaincre son amie d’exposer dans sa galerie et elle était prête à tout. Elle ouvrit son macbook et dévoila à Victoria ce qu’elle voulait lui montrer. Elle avait photographié sa galerie et remplacé ses toiles par celles de l’espagnole. En faisant ça Ari voulait lui la projeter dans son avenir, un avenir qu’elle espérait proche. « Qu’est ce que tu en penses ? » demanda la républicaine pour ne pas trop la brusquer, elle espérait faire mouche en lui montrant cette projection.