RHEN | trouver le calme dans ce vacarme avant que je ne m'y noie.

le chant des sirènes me replonge en hiver,
Ô mélancolie cruelle, harmonie fluette, euphorie solitaire.

Il lui semble irréel de se dire qu'il venait d'assister à la boucherie de l'année à Monterey. Tant de morts, tant de blessés. La panique qui l'a gagné lui a fait comprendre quelque chose, une germe d'idée, une évidence et pourtant. Il n'a pas le cœur à y réfléchir que les secours envahissent la salle et Lauren est transportée dans une ambulance dans laquelle on lui fait passer quelques tests rapides. Il a envoyé le premier ambulancier chier, cherchant du regard Scarlett sans pouvoir l'avoir dans sa ligne de mire. Il se fait embarquer de force par un petit gars à qui il essaye de faire comprendre que ce n'est pas utile, il veut juste retrouver sa rouquine et rentrer, se barrer d'ici, loin très loin. Enfin, pas tant que ça puisqu'il vit à quelques pâtés de maison de là. Il écarte le type et vomit tripes et boyaux à deux reprises, non ça va pas, mais hors de question d'aller à l'hôpital. Il se dit que d'ici une semaine il sera passé au dessus de tout ça. Les examens terminés il se fraie un chemin dans la foule, entre les invités secoués, les blessés et les autres. "Lauren ?" qu'il appelle en cherchant frénétiquement son amie du regard en vain. Son regard s'arrête sur Freddie, les mains pleines de sang et il secoue la tête, sent la nausée le gagner de nouveau et finit par mettre la main sur sa rouquine. "Lauren, ça va ?" qu'il demande rapidement en la serrant dans ses bras. "Tu as tes affaires, on s'en va."

Je vis un véritable cauchemar, tout ceci ne peut pas être réel. Les choses se passent trop vite, je n’ai le temps de contrôler quoi que ce soit que déjà, un coup de feu se fait entendre. Des cris, du sang, le chaos… Je me pince, essayant tant bien que mal de me réveiller mais la foule en délire me rappelle à l’ordre. Non Lauren, tu ne rêves pas. Ce mariage est véritablement en train de se transformer en bain de sang et ta carrière est probablement terminée. Je regarde tout autour de moi, cherchant désespérément Deb, qui doit être dans le même état. Tout va bien trop vite, je suis rapidement bousculée et tombe sur le sol. Je me relève rapidement, tandis que les secours ne tardent pas à arriver. Là, un homme m’attrape et me demande de le suivre, pour passer quelques examens. J’ai le bras en sang, probablement une égratignure liée à ma chute. Pas de quoi s’affoler, je ne cesse d’ailleurs de le répéter au brancardier. Je vois Freddie au loin, les mains couvertes de sang. J’ai envie d’aller vers lui, de lui dire combien je suis désolée mais je n’en ai pas la force. Rhett ne tarde pas à me rejoindre et cela me fait un bien fou de le retrouver. Il me serre dans ses bras et je ne peux pas m’empêcher de fondre en larmes, profondément choquée par tout ce qu’il vient de se passer. « Non ça va pas. Je veux partir d’ici, emmènes moi loin s’il te plait. » J’ai encore la scène de crime en tête, tête qui ne cesse de tourner. « Je… J’aurai dû faire quelque chose. Elles n’auraient pas dû mourir. » Je dis alors, complètement perdue. « Elles sont mortes Rhett. Et j’en suis responsable. »

Il ne pensait pas que Lauren se sentirait fautive de ce carnage, finalement, personne ne l'est. C'est la faute à pas de chance, qui aurait pu savoir qu'un taré viendrait foutre le bordel à un mariage ? Il la saisit alors pas les épaules en se penchant sur elle, plantant son regard dans le sien. "Lauren, tu ne pouvais rien faire !" qu'il gronde, il se racle la gorge, s'il monte sur ses grands chevaux, c'est simplement parce que si sa rouquine avait bougé le petit doigt, elle aurait pu y rester et cette idée glace le sang de Rhett. "Je ne sais pas ce que j'aurais fais s'il t'était arrivé malheur !" toujours sur le même ton, sec, nerveux, violent. Il soupire alors, la serre une seconde fois dans ses bras et entraîne la petite bonne femme loin du massacre, se frayant un chemin à travers la foule sous le choc. S'il veut quitter les lieux du crime au plus vite c'est qu'il est mal à l'aise, partir comme un voleur lui est égal. Il veut simplement se tirer. Il l'a cherchée du regard, Scar, et quand il vit qu'elle allait bien, enfin, qu'elle semblait vivante et active, cela lui suffit. La gorge serrée, la tête haute il avance. Ce qui s'est produit ce soir le touche plus qu'il ne le reconnaitra jamais, oui des gens sont morts, d'autres ont été blessés et deux personnes ont vu leur mariage être gâché par un malade armé. "Ce n'est pas de ta faute Lauren, tu m'entends ?" il se veut rassurant, en fait il veut qu'elle se le mette bien dans le crâne. Il se dit alors qu'il aurait dû s'écouter et ne pas participer à la cérémonie, qu'il aurait dû emporté Lauren loin de là dès le début. Ils quittent les lieux rapidement et c'est à pieds qu'ils gagnent la rue bondée de journalistes, de policiers et d'équipes de secours. Il serre la main de la jeune femme si fort qu'il lui broie presque la main et soupire. "On est vivants, putain, on est vivants..." il hoche doucement la tête, sans vraiment réaliser ce qui s'est passé ce soir. "Tu vas bien, on va rentrer, tu va voir, on va..." il ne sait pas ce qu'ils feront, mais il le feront. Comment se détendre, comment oublier ? "Il me faut un verre et un douche."

La culpabilité est un sentiment que je n’avais pas encore eu la chance de connaître. Et je dois dire que je m’en estimais heureuse car, désormais, je sais ce que l’on ressent. C’est horrible, je ne sais pas comment je vais pouvoir m’en remettre et remonter la pente après un tel fiasco. Ce mariage était la chose la plus importante pour notre carrière, à Deb et moi. Et jamais je n’aurai pu imaginer que des meurtres pourraient se produire, dans une ville aussi calme et adorable que la notre. Je ne suis pas responsable des meurtres, Rhett a raison sur ce point mais seulement, indirectement, j’aurai dû prévoir le pire. « J’aurai dû essayer de faire quelque chose, je ne suis pas le genre de nana qui reste dans un coin ! » Je m’en veux, même si cela m’aurait probablement couté la vie. Rhett me confie qu’il ignore la façon dont il aurait réagi s’il m’était arrivé quoi que ce soit. Je ne peux m’empêcher de sourire, touchée par tant d’attachement. « Tout comme je ne sais pas si je m’en serai remise s’il t’était arrivé quelque chose. » Je souffle à mon tour. Comment aurais-je pu vivre sans lui ? Impossible. Ses bras me font le plus grand bien, estompant mon mal être quelques instants. Malheureusement, ce dernier ne tarde pas à revenir et je pense qu’il sera là pendant une bonne partie de ma vie. Rhett insiste pour me faire comprendre que je ne suis pas responsable de tout cela, mais les larmes me gagnent rapidement et je craque. Je n’arrive pas à faire face à cela, je ne parviens pas à être forte. Nous passons la ribambelle de journalistes présents sur les lieux, qui tentent de m’interpeler. Je baisse la tête, hâtant le pas, tandis que Rhett ne lâche pas ma main. « Je veux rentrer, je ne veux pas te quitter… J’ai besoin de toi. » Je crois que c’est la chose qui me permettra d’aller bien, que je ne vois pas passer la soirée avec quelqu’un d’autre. Il est mon pilier, mon soutien et l’a toujours été. « Moi aussi ! Il me faut même une bouteille pour oublier ce cauchemar. » Je confie alors, tandis que nous arrivons devant un taxi, qui va nous mener jusqu’au domicile du jeune homme. « Ma vie est foutue. » Je lance alors, à voix basse.

L'entendre dire qu'elle aurait dû agir le rend malade, elle le disait elle-même que si quelque chose était arrivé au grand blond elle ne s'en serait jamais remise, pourquoi ne comprenait-elle pas qu'il en était de même pour lui. Dieu merci elle n'avait pas agit, il l'en avait empêchée, il l'aurait plaquée au sol bien plus tôt si cela avait été nécessaire. Il râle même et grogne pour se frayer un chemin au beau milieu des journaliste qui tentent d'interpeller la co-organisatrice de ce mariage, mais il est grand et fort, secoué, mais toujours aussi hargneux et déterminé à protéger sa rouquine de toute attaque quelle qu'elle soit. Il l'entend pleurer à chaudes larmes mais ne s'arrête pas pour autant, il n'a pas envie de se faire interpeller par ces rapaces avides de nouvelles croustillantes et de détails sordides.
Arrivés devant un taxi appelé au préalable il finit par articuler quelques mots avant d'ouvrir la portière, il se tourne vers Lauren et la prend par les épaules. "Ce soir, tu ne vas nulle part, hors de question que tu crèches dans ton appartement, tu restes avec moi." sa voix est ferme, son regard sévère, mais il n'osera pas avouer qu'il a bien trop peur de rester seul après ce tragique événement, qu'il en est incapable. Lauren est la lumière dans ces foutues ténèbres. Ils s'installent dans le taxi et Rhett indique l'adresse au chauffeur, observant du coin de l'oeil sa meilleure amie sombrer dans quelque chose de terrible, mais qu'il se trouve incapable de nommer. "Lauren, ta vie n'est pas foutue." un court instant il se tait, d'ailleurs il ne lui pas adressé un seul vrai regard depuis qu'ils ont posé leurs cul dans ce taxi. "Tu l'as pas invité ce connard de taré, on est d'accord, tu n'y es pour rien si c'est parti en couilles." qu'il grogne alors en fixant le paysage qui défile à travers la fenêtre. Il pense aux verres qu'il va s'offrir, à la bouteille qu'il va ouvrir pour Lauren, au programme qui les attend et à cette longue nuit de terreur qui ne fait que commencer, ce qui lui fait réaliser à quelle point la vie qu'il mène est futile et presque vide. Presque oui. Rapidement ils se retrouvent devant le haut portail de la propriété du bellâtre qui paie le chauffeur en espèces avant de sortir ouvrir la portière de sa rouquine. "Les mariés seront jamais assez cons pour blâmer ta collaboratrice, ni même toi et si c'est le cas..." il prend une profonde inspiration en l'aidant à sortir de l'habitacle. "J'irais leur en toucher deux mots, tu verras." en réalité Rhett ignore comment retirer du crâne de sa douce l'idée qu'elle absurde est fautive.

Quand j’y pense, je crois que je n’aurai jamais pu me pardonner qu’il arrive quoi que ce soit à l’un de mes proches. Deb, Rhett, Freddie, Evie… Jamais je n’aurai pu m’en remettre, leur absence aurait été bien trop difficile à gérer. Surtout pour Rhett, l’unique homme capable de réellement me comprendre. Il est mon meilleur ami, mon amant mais aussi un homme exceptionnel. La preuve ce soir, puisqu’il tente de m’aider à remonter la pente alors que lui même est perturbé par ces évènements. J’admire la force et le courage dont il fait preuve, j’aimerais pouvoir en dire autant de la mienne. Je lui confie ce que je ressens et lui demande de ne pas me laisser seule, n’ayant absolument pas envie de rentrer chez moi. J’ai clairement besoin de lui, notamment de ses bras qui savent si bien y faire quand je les retrouve. Sa voix ferme m’annonce qu’il est hors de question que je rentre, ce qui provoque un sourire sur mon visage pourtant éteint. « Ok. » Je réponds, comme pour le rassurer. J’ai l’impression que malgré tout, il a besoin que je lui confirme. Que je lui dise que je n’irai nul part. Mes idées noires reviennent aussi vite qu’elles étaient parties, mais par chance Rhett est bien décidé à me faire penser à autre chose. Il tente de me rassurer à nouveau, en me disant que je ne suis pas responsable des évènements. Je ne pouvais pas prévoir qu’un invité mystère ferait son apparition mais j’aurai pu l’éviter. « J’aurai pu l’éviter. Mettre plus d’agents de sécurité, j’ai merdé malgré tout. » Et quand il me parle des mariés, alors que nous arrivons devant son domicile, je ne parviens pas à me sentir soulagée. Je me répète sans doute et j’ignore avec quelle patience il parvient à me rassurer encore et encore. « Ce n’est pas la peine, mais merci de proposer c’est adorable. » Je ne veux surtout pas le mêler à tout ça, d’autant plus qu’il était présent au mariage par ma faute. « Rentrons. » Je souffle, en lui attrapant la main. Je veux oublier cette soirée, cette nuit horrible. « Embrasse moi. » Je lui demande, stoppée dans l’entrée de sa demeure. J’ai besoin de ça pour aller mieux, c’est indéniable.

Un sourire étire ses lèvres, faible, on sent la fatigue émotionnelle qu'il essaye de dissimuler et il obéit, s'exécute et donne à Lauren un tendre baiser, enveloppant son visage de ses mains, remontant de ses lèvres à son front. Il prend une profonde inspiration en se saisissant de la main de la jolie rouquine, remontant l'allée qui menait jusqu'à sa porte d'entrée. "On parle de ta potentielle vie foutue ce soir, on rumine, on boit et on se jure de ne plus jamais évoquer ça." qu'il lance froidement, d'un air faussement assuré en déverrouillant la porte et désactivant l'alarme. Non, jamais plus il ne voulait entendre SA Lauren dire que sa vie était foutue, jamais elle n'aurait pu deviner qu'un déséquilibré mental s'inviterait et sèmerait le trouble à la cérémonie. Seul un médium aurait pu prédire ce qui les attendaient ce soir. D'un geste de la main il allumait toutes les lumières intérieures et extérieures, y compris celles de la piscine. Encore remué par ce qui venait de se passé, un court instant il se demanda s'il était judicieux de consommer de l'alcool ce soir, mais la raison se tut rapidement et il sortir du bar un magnum de champagne. "On va fêter le fait que nous sommes en vie et que mine de rien, ce fiasco sera un excellent coup de pub pour ta société d'événements nuptiaux !" voir le verre à moitié plein, voilà ce qu'il se disait, il s'en persuadait même, pourtant s'il avait été seul ; les lumières seraient restées éteintes et il se serait allongé sur le sol à attendre que le jour se lève en réfléchissant au sens de la vie. "Je sais pas quoi faire Lau'..." lâcha t-il alors, deux verres à pieds dans les mains, face à son magnum de champagne, démuni. "Je sais pas quoi te proposer pour arrêter de penser à ça, pour que t'arrête de te dire que ta carrière est finie..." il soupira longuement, posant bruyamment les verres sur le comptoir, passant ses mains sur son visage en prenant une profonde inspiration.

Ses lèvres me font le plus grand bien. Cette soirée fut des plus horribles et je ne parviens pas à me sortir les images sombres que j’ai en tête. Heureusement, Rhett est là et je peux compter sur son soutien pour m’aider à remonter la pente. Boire, voilà donc la meilleure option qui s’offre à nous. Je m’en veux de l’avoir mêlé à tout cela, c’est à cause de moi qu’il a vécu cette horrible soirée car il était mon invité. Je ne pouvais pas prévoir ce qu’il se passerait, c’est certain mais j’aurai dû le garder éloigner, le protéger. S’il lui était arrivé quoi que ce soit, je ne m’en serais jamais remise. « Je vais essayer, c’est promis. Je suis tellement soulagée que tu n’ais rien, que tu sois sain et sauf. » Je peux m’estimer heureuse, tout le monde n’a pas eut cette chance malheureusement. Je ne peux m’empêcher d’avoir une pensée pour Freddie, qui avait l’air au plus mal face à la perte de Clarke. Il faut que je l’appelle, que je lui prouve que je suis capable de penser à autre chose qu’à ma personne. Mais pour l’heure, il faut que je me vide la tête et que j’oublie cette soirée, soirée qui a signé la fin de ma carrière de wedding planneuse. Rhett se montre optimiste en parlant d’un coup de pub, avis que je suis loin de partager. Mais je préfère ne rien dire, pour ne pas le brusquer. Après tout, il tente tant bien que mal de me remonter le moral, je ne peux pas le lui reprocher. Malgré tout, Rhett me connaît par cœur et voit bien que les choses ne sont pas si simples. Je ne parviens pas à cacher ma peine, ma colère et lui se trouve désemparé. Il ne sait pas comment faire, il ne tarde pas à me le dire et je décide de me lever pour le rejoindre derrière le bar. Là, je prends son visage entre mes mains. « Je crois que seul le temps pourra m’aider Rhett. » Je souffle, avant de poser mon visage contre le sien et fermer les yeux un court instant, tout en inspirant longuement. « J’ai juste besoin d’être avec toi pour aller mieux. Juste toi. » J’ajoute, avant de décoller mon visage pour l’embrasser à nouveau. « Ouvrons cette bouteille et faisons ce que nous savons faire de mieux : oublier nos soucis. »

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